Système de Combat Aérien du Futur (SCAF) et Next Generation Fighter (NGF)
(France – Allemagne – Espagne)
Le programme en quelques mots
- 2014 : France et Royaume-Uni lancent des études préliminaires.
- France et Allemagne annoncent leur intention de développer conjointement un système de combat aérien européen.
- Juillet 2018 : Les britanniques annoncent lors du salon de Farnborough le lancement du Tempest.
- Juin 2019 : Dassault Aviation dévoile une première maquette du Next Generation Fighter au salon du Bourget.
- Décembre 2022 : Dassault Aviation et Airbus trouvent un accord afin de démarrer la Phase 1B.
- Avril 2023 : France, Espagne et Allemagne annoncent le lancement des travaux de la Phase 1B.
- …
Le Système de Combat Aérien du Futur
Le Système de Combat Aérien du Futur (SCAF)(*) est un projet international d’un ensemble de systèmes d’arme aérien connectés entre eux. Il existera un SCAF pour chaque pays détenteur. Son principe repose sur la connexion de différents systèmes :
- avions de surveillance,
- ravitaillement en vol et commandement,
- avion de combat de nouvelle génération (Next Generation Fighter, NGF),
- drones (Remote Carriers).
Cependant, au-delà d’un “simple” réseau, il est également crucial que ces ensembles puissent collaborer avec les vecteurs existants et composants les forces aériennes des trois parties prenantes (Allemagne, Espagne et France). On pense notamment aux Eurofighter, Rafale, MRTT ou encore A400M.
Ce programme est indispensable au renouvellement de l’aviation de combat de la France, de l’Allemagne et de l’Espagne à l’horizon 2040. Il est également essentiel à la préservation de l’autonomie stratégique et de la base industrielle et technologique de défense européennes.
2010 : les premiers travaux franco-britanniques
Paris et Londres signent fin 2010 les accords de Lancaster House. Ils visent à développer la coopération militaire entre les deux pays. Les études s’engagent sur un système centré autour d’un drone de combat, grâce à l’expérience acquise lors du développement des démonstrateurs Dassault Neuron (premier vol le 1er décembre 2012 en France) et BAE Systems Taranis (qui a volé en 2013).
Le saviez-vous ? nEUROn est le premier UCAV mis en œuvre depuis plusieurs bases aériennes européennes. Il réalise également le 1er tir d’un armement en soute, ainsi que le 1er vol en formation avec un avion de combat. Son niveau de furtivité reste inégalé en Europe, simulé puis éprouvé face à des menaces réelles de différents types.
Les deux pays lancent en 2014 des études préliminaires supervisées par la Direction Générale de l’Armement et le Defence Equipment and Support. Elles sont confiées aux industriels Dassault Aviation, BAE Systems, Thales, Leonardo, Rolls-Royce et Safran Aircraft Engines.
En 2016, les deux pays engagent la phase suivante de réalisation d’un démonstrateur. Cependant, le projet piétine, rappelant les débuts des programmes Rafale et Typhoon.
Les britanniques annoncent lors du salon de Farnborough en juillet 2018 le lancement du Tempest, leur propre concept d’avion de combat de future génération. Il doit répondre aux besoins exprimés par le ministère britannique de la Défense. Ce projet intervient comme une riposte au lancement du programme franco-allemand, en 2017.
2017 : le projet franco-allemand
Le , la France et l’Allemagne annoncent leur intention de lancer le développement conjoint de plusieurs systèmes d’armes dont un système de combat aérien européen. En 2019, le traité sur la coopération et l’intégration franco-allemandes ouvre les perspectives à de nouveaux partenaires.
Airbus Defence and Space présente sa vision du SCAF fin 2017 lors du salon Innovation and Leadership in Aerospace (ILA) à Berlin. Dassault Aviation et Airbus annoncent le un accord de coopération pour réaliser le SCAF.
Le , les deux ministres allemand et français désignent la France comme nation leader sur le projet.
En février 2019 les ministres de la Défense de l’Allemagne, de l’Espagne et de la France actent la volonté des Espagnols d’intégrer le programme. A ce titre, la société Indra rejoint le programme par un amendement du 28 juillet 2020.
Définir les besoins opérationnels du “Next Generation Fighter“
En avril 2018, France et Allemagne signent le document de définition des exigences opérationnelles communes, qui définit les tâches essentielles de l’avion :
Ainsi, le système devra :
- répondre aux exigences de l’ensemble des missions air-air et air-surface,
- être furtif,
- s’intégrer avec les moyens de l’OTAN et de l’UE,
- être embarqué sur un porte avion,
- exploiter le potentiel de l’intelligence artificielle,
- travailler en réseau, en particulier avec des drones des moyens de différents types.
En février 2019, un premier marché d’étude de concept commune de 65 millions d’euros est notifié à Dassault Aviation et Airbus Defence and Space.
En même temps, Safran Aircraft Engines et le motoriste allemand MTU Aero Engines signent un accord de coopération. Ils développeront de nouveaux moteurs à réaction pour le futur avion.
Future Combat Air System (FCAS)
Le démonstrateur NGF devrait voler en 2027
Le
- Le Next Generation Fighter avec Dassault Aviation comme maître d’œuvre. Airbus comme partenaire principal.
- Un Unmanned Systems Remote Carrier avec Airbus comme maître d’œuvre. MBDA et Satnus comme partenaires principaux.
- Un Combat Cloud avec Airbus DS comme maître d’œuvre. Thales et Indra comme partenaires principaux.
- Les moteurs avec Safran et MTU comme partenaire principal (Joint venture EUMET).
- Simulateurs avec Dassault Aviation comme maître d’œuvre. Airbus et Indra comme partenaires principaux.
- Capteurs avec Indra comme maître d’œuvre. Thales et FCMS comme partenaires principaux.
- Furtivité avec Airbus comme maître d’œuvre. Dassault Aviation comme partenaire principal.
Cet accord cadre initial représente 150 millions d’euros de budget. Le programme prévoit la signature de la phase 1B entre la mi-2021 et la mi-2022.
France et Allemagne promettent d’injecter 4 milliards d’euros d’ici 2025. Par ailleurs, le premier démonstrateur du NGF devrait voler en 2027. Il ouvrira la voie d’une 6e génération d’avions de combat.
Vraisemblablement, la future motorisation sera plus compacte que le M88 équipant le Rafale, mais également plus puissante. Par ailleurs, elle contribuera à sa furtivité et sa turbine supportera 1800°C (1500° pour le M-88). Pour cela, Safran s’est doté d’une plateforme de recherche d’aubes de turbines avancées pour développer une technologie et des matériaux sophistiqués capables de résister à ces températures. Le moteur devra par ailleurs avoir un cycle variable.
En d’autres termes, il devra être capable d’ajuster le rapport entre les flux d’air primaire et secondaire, et avoir une buse réglable pour faciliter la maniabilité de l’avion. Un autre domaine d’innovation qui sera exploré consistera à rendre le moteur hybride pour gérer les problèmes énergétiques embarqués (source).
2019 : première apparition du projet Next Generation Fighter de Dassault Aviation au salon du Bourget
Une place importante pour les drones
Une connectivité primordiale
Le NGF sera au cœur d’un dispositif misant sur la connectivité et l’interconnexion des systèmes. Chez Dassault, c’est au Rafale F4 qu’il revient d’en définir les contours. En effet, ce nouveau standard prévu pour 2024 basculera le Rafale dans l’ère du big data et de l’hyperconnexion. “Ce standard F4 est un saut technologique, un saut industriel, un saut stratégique”, a fait valoir la ministre des Armées, Florence Parly en 2019.
A ce titre, le Rafale F4 intégrera une liaison satellitaire et intra-patrouille, serveur de communication et radio logicielle.
A terme, le SCAF prévoit d’exploiter tout un système d’armement au sein d’un “Air Combat Cloud“.
L’Intelligence Artificielle (IA) sera également au cœur du programme, avec le développement par Dassault du “Man Machine Teaming“. Ce développement ambitionne de construire un système cognitif aérien interagissant avec le pilote.
Images ci-dessous (2020) © ERIDIA Studio / Dassault Aviation – V. Almansa.
Des drones connectés et une nouvelle panoplie d’armements
Au sein du SCAF, les drones joueront également un rôle crucial. Ainsi, Airbus et MBDA travaillent à des engins mi-drones, mi-missiles. Leur l’objectif sera d’épauler le pilote du NGF au cours de sa mission. Leurs attributions seront multiples : brouillage, reconnaissance, tirs d’armements, saturation des défenses aériennes, voire même armes à énergie dirigée.
Pilotables de manière semi-autonome, ces drones pourront être de différents types. En 2019, MBDA présentait à l’occasion du Salon du Bourget ses modèles RC (Remote Carrier) 100 et 200 de respectivement 100 et 200 kg. Il semble prévu de pouvoir embarquer ces appareils sur le chasseur NGF, ainsi que sur A-400M.
Un Porte-Avions Nouvelle Génération (PANG) pour succéder au Charles de Gaulle
Depuis sa rénovation à mi-vie en 2018, le Charles de Gaulle met en œuvre une flotte composée exclusivement de Rafale. Néanmoins, le bâtiment n’a vocation à demeurer opérationnel que jusqu’à horizon 2040, date à laquelle son successeur devra prendre le relai.
Facteur d’autonomie stratégique, le porte-avions est indispensable pour la France. Avec la dissuasion nucléaire, il contribue à faire de celle-ci une puissance diplomatique et militaire de premier rang.
Le SCAF se compose d’un avion principal, le NGF (New Generation Fighter) et d’effecteurs déportés (drones). Le NGF aura une masse plus importante que celle du Rafale pour combiner allonge, furtivité et augmenter la capacité d’emport. La masse du NGF est évaluée à 30 tonnes, contre un peu plus de 20 tonnes pour les actuels Rafale Marine.En conséquence, le gabarit du futur porte-avions dépendra évidemment aussi du nombre de NGF, de Hawkeye de nouvelle génération et d’hélicoptères que l’on souhaite pouvoir embarquer, ce qui dépend de la définition du besoin opérationnel, donc de l’étude des scénarios auxquels la Marine doit se préparer.
Pour faire face à des situations de “haute intensité”, le porte-avions devra être en capacité de mener jusqu’à 60 sorties armées par jour. L’objectif étant également de pouvoir rester déployé en mer pendant presqu’un an, selon le modèles des navires de l’US Navy.
La DGA notifie Naval Group le 26 avril 2024 du marché permettant d’engager les premiers travaux de réalisation des chaufferies nucléaires du PANG.
Spécifications :
- Déplacement à pleine charge : 75 000 t
- Longueur : 310 m
- Largeur à la flottaison : 39 m
- Superficie du pont d’envol : 17 000 m²
- Tirant d’eau maximum : 10,8 m
- Deux ou trois catapultes électromagnétiques de 90 mètres (EMALS) de General Atomics
- Capacité : 30 chasseurs de nouvelle génération (NGF) et Rafale
- Vitesse maximale : 30 nœuds
Un porte-avions opérationnel en 2038 ?
En ouverture du salon Euronaval d’octobre 2020, Florence Parly confirme le lancement prochain du programme militaire visant à donner un successeur au Charles de Gaulle en 2038. Il s’agira d’un porte-avions à propulsion nucléaire (2 réacteurs K22), dont le déplacement afficherait près de 75000 tonnes, contre 42000 pour le Charles de Gaulle.
Portant la puissance des chaufferies de 150 à 440 MW, les deux nouveaux réacteurs participeront également à répondre aux besoins énergétiques des 2 catapultes. Celles-ci seront du modèle EMALS (Electromagnetic Aircraft Launch System) provenant des Etats-Unis (General Atomics). Le système de récupération (Advanced Arrested Gear), quant à lui, permettra de régler plus finement la puissance du freinage et sera également américain.
Concernant les étapes de sa fabrication, les hypothèses font état (Source) :
- 2021-2026 : études détaillées.
- 2026-2028 : phases de “développement”.
- 2028 : usinage des premières tôles et assemblage des premiers blocs.
- 2033 : mise sur cale.
- 2034 : assemblage de la “poutre-navire” (coque) en 12 mois.
- 2034-2035 : Naval Group assure l’intégration du système de combat, des systèmes de navigation, aviation.
- 2036-2037 : essais à la mer.
- 2038 : Admission au Service Actif.
De nouveaux senseurs à l’étude
Fin novembre 2020, la société espagnole Indra se voit confier par la DGA le développement du radar du NGF, ainsi que l’ensemble des senseurs qui équiperont l’appareil. Les sociétés française Thales et allemande Hensoldt seront partenaires du projet.
Si Thales (ex Thomson CSF) dispose d’une expérience plus significative qu’Indra dans le domaine des radars, Indra se joint à Hensoldt en 2020 pour l’élaboration du futur radar AESA du Typhoon. Thales, rappelons-le, développe des radars depuis le Cyrano II du Mirage III, avec aujourd’hui le RBE2 AESA depuis 2012.
Dans le cadre de la “p‘étude conceptuelle des capteurs durera 1 an, prolongeable 6 mois supplémentaires.
Décembre 2020 marque la signature d’un premier contrat-cadre qui place Airbus au cœur des développements du programme en Espagne. Le constructeur y pilotera les projets NGF et Low Observability (furtivité). Ce contrat couvre les premiers travaux de développement des démonstrateurs du programme et la maturation des technologies clés, dans l’optique d’entamer les essais en vol du démonstrateur NGF au second semestre 2026.
Les difficiles débuts d’une coopération internationale
Lors de la présentation des résultats annuels du groupe Dassault Aviation le 5 mars 2021, le PDG, Eric Trappier, évoque les difficultés rencontrées. Selon lui, le rôle de maître d’œuvre dans le développement du programme Next Generation Fighter est “de plus en plus difficile à tenir”. En effet, un certain désaccord sur le partage des tâches semble émerger entre les trois pays.
Partenaire du programme, Airbus souhaite que davantage de “work packages” soient établis en “joint”, c’est à dire sans un responsable désigné. En conséquence de quoi, l’autre moitié des développements se répartit entre la France, l’Allemagne et l’Espagne. Ce qui veut dire que Dassault a encore moins de responsabilités dans les 50% restant …
Une telle organisation n’est pas sans conséquence sur les “work packages” dits sensibles ou stratégiques. En effet, l’Allemagne revendique la possibilité d’accéder à l’ensemble des technologies. Cependant, cela n’est pas sans poser la question de propriété intellectuelle pour Dassault Aviation. “Celui qui créé doit rester le propriétaire de sa technologie” revendique le constructeur français, en évoquant ses 70 ans d’expérience.
Vers un “plan B” ? Si ces difficultés ne sont pas sans rappeler le programme ACX des années 80, Eric Trappier reste confiant pour la réussite du programme, mais ne se cache pas de disposer d’un plan de secours. En effet, résultat d’une longue expérience, Dassault, Safran, Thales et MBDA “savent faire des avions tout seul”. Reprenant l’exemple du programme nEURONn, Dassault pourrait ainsi proposer une alternative : rester maître d’œuvre principal et s’associer à de nouveaux partenaires européens.
Le Global Combat Air Program (GCAP) : Royaume-Uni, Italie, Japon à pied d’œuvre
A noter que, en ce qui concerne le programme “concurrent” Tempest, le gouvernement britannique confirme en juillet 2021 une nouvelle enveloppe budgétaire de 250 millions de £ sur les 2 milliards prévus. Cette enveloppe budgétaire profite essentiellement à BAE Systems. Les 3 pays partenaires du programme Tempest estiment d’ailleurs à 62000 le nombre d’emplois concernés par an (Royaume-Uni, Italie et Suède). A son tour, Rome annonce ouvrir une enveloppe budgétaire de 2 milliards d’euros en août 2021.
La Royal Air Force espère une Initial Operating Capability (IOC) pour 2035.
Courant décembre 2022, c’est au tour du Japon de se joindre au programme. Etonnamment, sans faire allusion à la Suède, Royaume-Uni, Italie et Japon évoquent désormais un Global Combat Air Program (GCAP). Tokyo fusionne ainsi avec le Tempest, son ambitieux projet F-X dont Mitsubishi assurait l’étude. En février 2023, l’Arabie Saoudite déclare signer une lettre d’intention concernant sa participation au programme. Riyad pourrait donc rejoindre le programme, sans évoquer l’objet de sa contribution.
En avril 2023, le ministère de la défense britannique attribue à BAE Systems une enveloppe de 656 millions de £ pour financer la poursuite des travaux de développement.
Les M-88 du Rafale pour motoriser le prototype du NGF ?
Début 2021, Safran et l’allemand MTU annoncent avoir scellé un accord portant sur les moteurs du Next Generation Fighter. A ce titre, c’est le M88 du Rafale qui assurerait la propulsion du prototype.
Le 29 avril 2021, par le biais de leur joint venture EUMET, Safran Aircraft Engines, MTU et ITP Aero confirment un accord global visant à produire et soutenir la future motorisation du NGF. Cette accord assure une répartition à parts égales entre la France, l’Allemagne et l’Espagne.
Vers une signature des phases 1B (2021 – 2023) et 2 (2024 – 2027)
Le 17 mai 2021, les Ministres de la défense des trois pays publient un communiqué. Ils annoncent la finalisation des discussions portant sur le contenu de la prochaine phase (1B) du programme. Les partenaires (DGA pour la France, BMVg pour l’Allemagne et DGAM espagnole) semblent avoir trouvé un équilibre.
Le 23 juin 2021, le Bundestag allemand donne son aval au financement de la prochaine phase de développement du SCAF. Les députés libèrent une enveloppe budgétaire de 1,3 milliards d’euros sur les 4,5 milliards nécessaires.
Après une “phase 1A” (2020-2021) de mise en place du contrat cadre initial, la phase 1B (2021-2023) devrait donc prochainement donner lieu à une contractualisation entre les 3 pays partenaires du programme. Cette nouvelle étape regroupera les travaux en coopération de la France, l’Allemagne et Espagne et débouchera sur un démonstrateur.
De son côté, Dassault Aviation indique vouloir débuter les essais en soufflerie de sa version du NGF en septembre 2021.
Finalement, le 30 août 2021, France, Allemagne et Espagne signent l’accord intergouvernemental de développement d’un démonstrateur du Système de Combat Aérien du Futur (SCAF). Cet accord couvre les phases 1B et 2 du programme. La phase 1B prévoit un investissement à parts égales de 3 milliards d’Euros. La phase 2 quant à elle exigera 4,2 milliards.
Premiers essais pour le futur réacteur du NGF
La Direction Générale de l’Armement accomplit fin 2021 un essai majeur pour le développement du réacteur du NGF. Dans le cadre du projet “Turenne”, un prototype dérivé du réacteur du Rafale a été éprouvé au banc d’essai. Un essai unique, résultat de 5 ans de préparation.
Initié en 2015 par la DGA et confié à Safran, le programme “Turenne” se compose de deux phases. La 1ère phase (5 ans), consistait à créer, tester numériquement, et produire un concept innovant de turbine en utilisant des procédés modernes :
- maquette numérique évolutive,
- simulations numériques 3D,
- design numérique de nouveaux alliages métalliques,
- prototypage en fabrication additive.
La 2e phase, débute en 2019 à l’aide de la technique Thermocolor. Son objectif consiste à comparer la cartographie thermique obtenue au réel avec les données des simulations réalisées numériquement dans la phase 1. Cet essai est spécifique par sa technique qui requiert de la peinture thermosensible, appliquée sur les pales des aubes de turbine haute pression du moteur. Elle permet de mesurer la température grâce à un changement de couleur.
A l’issue des analyses, un essai dit “d’endurance” sera réalisé pendant plusieurs mois. L’objectif est d’imposer un vieillissement accéléré à ces nouvelles aubes de turbine de moteur. Cela permettra de vérifier leur durée de vie et leur capacité à garantir un haut niveau de performance opérationnelle sur de longues durées.
Vers un Système de Combat Aérien du Futur franco-français ?
“Quelque part, je pense que l’on a suffisamment fait d’efforts pour que, maintenant, on puisse y aller“, s’agace le PDG de Dassault Aviation, lors de la conférence de presse le 4 mars 2022. En effet, la maîtrise d’œuvre du NGF fait l’objet d’une mésentente entre l’avionneur et Airbus. “Avec la France qui est leader sur le contrat, Dassault Aviation est prêt à signer. On a fait tout ce qu’il fallait pour pouvoir signer avec Airbus. J’attends la signature d’Airbus“.
Pour Dassault, il s’agit de garder les leviers devant lui permettre d’assurer la maîtrise d’œuvre du NGF :
- commandes de vol (celles du Falcon 10),
- architecture fonctionnelle,
- interface homme-machine,
- furtivité.
“Il y a effectivement une divergence d’interprétation entre nous et Dassault sur la manière de mener une véritable coopération industrielle. Notre désaccord porte plus particulièrement sur le partage des tâches sur les commandes de vol et la furtivité. Si Dassault souhaite diriger ces deux dossiers clés sans nous consulter, c’est non. Airbus n’est pas fournisseur de Dassault sur cet avion. Nous sommes le partenaire principal”, affirme Michael Schoellhorn, PDG d’Airbus en juin 2022.
“Entre nous, 2040, c’est déjà perdu car comme on ne démarre pas sur la phase à venir, ça prendra un peu de temps. Pour 2040, il y aura peut-être un premier standard, donc on est parti plutôt sur les années 2050″. C’est en ces termes qu’Éric Trappier résume la situation lors du Paris Air Forum en juin 2022.
Phase 1B : Dassault Aviation et Airbus trouvent un accord le 1er décembre 2022
“Nous allons pouvoir entrer dans l’exécution de la nouvelle phase d’études, dite 1B, qui doit préparer le développement d’un démonstrateur, qui devrait voler vers 2029… Nous sommes confirmés dans notre rôle de maître d’œuvre et d’architecte de l’avion et nous avons obtenu la protection de notre savoir-faire industriel et de nos technologies… Être l’architecte d’un nouvel avion de combat est très motivant pour notre société, nos équipes, celles d’Airbus notre partenaire principal, d’Indra et de nos partenaires historiques que sont Safran, Thales et MBDA. Sans oublier notre écosystème de sous-traitants, dans les trois pays, qui participera à l’aventure… Sans compter tous les jeunes que nous allons recruter pour travailler avec les plus anciens, qui ont participé à l’aventure du Rafale”, déclare Eric Trappier.
L’entrée en service opérationnel pourrait avoir lieu vers le milieu des années 2040.
Selon le communiqué de presse de Dassault Aviation en date du 16 décembre 2022, la phase 1B se matérialise par un premier budget de 3,2 milliards d’Euros. Celui-ci couvrira les travaux de démonstration du SCAF pendant 3 ans et demi. Le premier vol du NGF devrait désormais avoir lieu courant 2028-2029.
Dassault Aviation, Airbus et Indra coordinateurs du programme
La gouvernance industrielle de la phase 1B est organisée par domaine comme suit :
- Cohérence, démonstrations et consolidation du NGWS avec Dassault Aviation, Airbus et Indra Sistemas comme partenaires co-contractants.
- Avion de Nouvelle Génération (NGF) avec Dassault Aviation comme maître d’œuvre pour la France, et Airbus comme partenaire principal pour l’Allemagne et l’Espagne.
- Moteur du NGF avec la Joint Venture 50/50 EUMET – entre Safran Aircraft Engine pour la France et MTU Aero Engines pour l’Allemagne – comme maître d’œuvre et ITP pour l’Espagne comme partenaire principal.
- Systèmes sans pilote, drone d’appui (RC) avec Airbus pour l’Allemagne comme maître d’œuvre, MBDA pour la France et Satnus pour l’Espagne comme principaux partenaires.
- Cloud de Combat (CC) avec Airbus pour l’Allemagne comme maître d’œuvre, Thales pour la France et Indra Sistemas pour l’Espagne comme principaux partenaires.
- Simulation avec Airbus, Dassault Aviation et Indra Sistemas comme partenaires cocontractants.
- Capteurs avec Indra Sistemas comme maître d’œuvre pour l’Espagne, et Thales pour la France et FCMS pour l’Allemagne comme principaux partenaires.
- Discrétion (Enhanced Low Observability) avec comme maître d’œuvre Airbus pour l’Espagne, et comme partenaires principaux, Dassault Aviation pour la France et Airbus pour l’Allemagne.
- Environnement de travail commun avec Dassault Aviation, Airbus, Indra Sistemas et EUMET comme partenaires co-contractants.
France, Espagne et Allemagne annoncent le lancement des travaux de la phase 1B le 28 avril 2023.
L’hypothèse d’une acquisition par la France de 200 SCAF / NGF pourrait s’évaluer à un budget de 36 milliards d’Euros, pour un programme total à 66 milliards.
La Belgique pays observateur
Comme il avait été annoncé lors du salon du Bourget 2023, c’est finalement en avril 2024 que le conseil des ministres belge donne son accord afin d’investir 60 millions d’euros en vue de son adhésion au projet SCAF. La Belgique rejoint ainsi le programme avec un statut observateur. Selon la ministre de la défense belge, ce statut permettra le suivi du programme, dans l’hypothèse d’une future participation.
@ suivre …
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