Visite de l’Escadron d’Entraînement 03/008 Côte d’Or, sur la base aérienne 120 de Cazaux.
Un escadron d’Alphajet nous direz-vous, alors que nous sommes sur un site dédié au Rafale ? Pour vous expliquer la raison et pour faire court, le “Côte d’Or” est un escadron de “bandits” qui volent régulièrement avec des Rafale pour des campagnes d’exercices. Par exemple, un escadron de Rafale ou même de Mirage 2000 a besoin de simuler une intrusion ou une attaque aérienne provenant d’ennemis (L’Alphajet pouvant simuler n’importe quel type d’avion), on fait appel au “Côte d’Or” pour simuler ces “bandits” et ainsi jouer ce scénario dans des conditions réelles.
Comme vous le savez, notre but est de vous présenter tous les acteurs qui travaillent autour du Rafale. C’est pourquoi nous vous proposons aujourd’hui une visite de l’Escadron d’Entrainement 03.008 “Côte d’Or”.
Traditions et missions du 3/8
À l’été 2015, sept escadres de l’armée de l’air ont été créées sur les bases aériennes d’Évreux, Saint-Dizier, Luxeuil, Mont-de-Marsan, Cazaux et Orléans.
L’escadre vise à rassembler le personnel autour de la mission et à organiser le commandement local en vue d’optimiser l’activité opérationnelle. Mais c’est également l’occasion de raviver certaines traditions qui fondent les valeurs et l’identité des aviateurs.
Les principales unités qui composent la 8e Escadre de Chasse sont :
- Le 01/008 « Saintonge », Escadron de Transition Opérationnelle
- Le 02/008 « Nice », Escadron de Transition Opérationnelle
- L’Escadron d’Entraînement 03/008 « Côte d’Or »
- L’Escadron de Soutien Technique Aéronautique 15/008 « Pilat »
Deux escadrilles composent le « Côte d’Or » : la SPA 57 « Mouette » et la SPA 65 « Chimère ». Toutes deux ont célébré leur centenaire en 2015. Les puristes observeront l’absence de la SPA 94, “Mort qui fauche”, peut-être fera-t-elle son retour prochainement ?
Créée en mai 2008, des aspects économiques mais aussi opérationnels donnent naissance à une unité d’entraînement équipée d’Alphajet : l’Escadron d’Entraînement 2/2 Côte d’Or, stationné sur la base aérienne 102 de Dijon-Longvic.
Après diverses restructurations et la renaissance des Escadres, le 2/2 devient 3/8 et s’installe à Cazaux en 2015.
Le « Côte d’Or » : l’escadron « Aggressor »
70% des missions du 3/8 sont consacrées au rôle de plastron, également appelé « Aggressor » ou « Red Air ». Le « red air » constitue le cœur de l’activité de l’escadron. Ce concept anglo-saxon né de la Guerre Froide symbolise l’opposition entre les « gentils » (les bleus), et les « méchants » (les rouges).
L’escadron est ainsi régulièrement sollicité lors d’application de scénarios d’entraînement au profit des unités Rafale ou Mirage 2000, mettant ainsi en œuvre des tactiques de combat air-air à portée visuelle, ou au-delà.
Dépourvu de radar ou d’avionique moderne, l’Alphajet s’avère cependant un redoutable adversaire en combat rapproché, le « dogfight ». Les missions sont multiples et de différentes natures, selon les demandes adressées par les autres unités de l’Armée de l’Air ou de la Marine : voler en ligne droite, simuler un avion de transport ou un appareil agressif, etc.
En complément, l’escadron assure également la formation des JTAC (Joint Terminal Attack Controller, les spécialistes de l’appui aérien), ainsi que des missions de remorquage de cibles destinées au tir air-air.
Briefing !
La journée débute par un accueil du Capitaine “Julien” qui nous a amené à son escadron et nous l’a présenté. Passé le café pour faire connaissance, nous avons eu la chance de suivre le déroulement d’un briefing avant une mission et en français qui plus est ! Cependant, il s’agirait plutôt de “franglais”. En effet, tous les termes techniques sont en anglais. Les pilotes nous confirmeront plus tard que pour la formation de pilote, il faut à la fois être en bonne condition physique mais également avoir un bon niveau d’anglais ! Si vous ne parlez pas anglais, passez votre chemin.
Durant ce briefing, le chef de patrouille présente la mission sur plusieurs points :
- Qui fera quoi,
- Comment la mission se déroulera,
- En cas de panne (radio par exemple), ce qu’il faudra faire,
- Suivant le niveau de carburant de chacun, les choses se passeront de telle ou telle façon,
- Comment se passera le retour pour chacun,
- Etc…
Une fois ce briefing fait, les pilotes reçoivent les dernières recommandations de la part du commandant d’escadrille et se dirigent vers les avions. Mais avant d’y prendre place, le pilote fait le tour de son appareil en compagnie de son mécano pour s’assurer que tout à bien déjà été contrôlé et qu’il n’y a pas d’aberration sur l’avion.
Maintenant que tout est ok, les pilotes peuvent monter dans l’avion.
Le « Gadget »
L’Alphajet réalise son premier vol en 1973. Il est opérationnel dans l’Armée de l’Air depuis 1979.
Affectueusement surnommé « Gadget » en raison de sa petite taille (12 mètres de long), l’avion n’en est pas moins un opposant de taille : agile, puissant et fiable. Equipé de 2 réacteurs de 1.3 tonnes de poussée, l’Alphajet est capable d’opérer jusqu’à 40000 pieds et Mach 0.85.
D’une avionique restreinte, la navigation est assurée par un GPS Garmin 296 en mesure d’intégrer les zones de combat et de prendre en compte le « Bull’s eye » : point de référence des missions de combat.
Les pilotes disposent également d’un UMPC (Ultra Mobile Personnal Computer). Il s’agit d’un petit ordinateur à écran tactile, positionnable sur la cuisse du pilote et dans lequel des images satellites ont été chargées. Elles permettent par exemple d’analyser visuellement l’environnement lors d’une mission d’appui aérien rapproché “Close Air Support”.
Un siège éjectable Mk10L assure la sécurité de l’équipage en autorisant des éjections au niveau du sol. Il contient également un paquetage de survie.
Les ETO (Escadron de transition opérationnelle) 1/8, 2/8 et 3/8 peuvent également mettre en œuvre un canon de 30 mm monté sous l’appareil, ainsi qu’emporter 2500 kg de charges réparties sous 4 points d’ancrage sous voilure.
Départ en mission
Nous partons rapidement au pied de la tour de contrôle pour photographier nos pilotes au décollage. Nous les avons eu de justesse !
Maintenant qu’ils sont partis, nous prenons le temps de monter à la tour de contrôle pour y voir le panorama et pour faire connaissance avec le contrôleur. Celui-ci nous explique dans les grandes lignes son activité et les différents métiers que l’on peut retrouver dans la tour :
- Surveillance au sol (2D) et en vol (3D)
- Contrôle du trafic
- Approche radar
Ces métiers sont tous accessibles au niveau bac et avec la formation, on peut espérer être opérationnel en deux ans. Ce sont des métiers qui cherchent du monde ! Tout comme le métier de pilote !
Il est maintenant l’heure d’aller manger ! Direction de mess des officiers qui est à l’autre bout de la base, au bord du lac de Cazaux. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le cadre y est superbe !
Visite cabine
Mais revenons aux choses sérieuses. Après le déjeuner, en route pour faire le tour d’un Alphajet en compagnie du Capitaine “Julien”. Un avion a été sécurisé spécialement pour nous. Nous pouvons donc monter à bord en toute sécurité et nous prendre, l’espace d’un instant, pour de potentiels pilotes !
Le cockpit est clairement plus rudimentaire que celui d’un Rafale. Nous ne sommes pas du tout sur la même technologie, ni sur la même utilisation d’ailleurs ! L’appareil n’est pas équipé de GPS par exemple. Pour combler ce manque, ce sont des GPS Garmin qui ont été rajoutés et qui sont programmés par les soins de l’armée de l’air.
Le Capitaine nous fait faire également le tour de l’avion, tel un mécano et un pilote le font avant le décollage.
Dans l’atelier, les outils sont enfermés dans leur armoire par cadenas. Pourquoi ? Simplement pour s’assurer que tous les outils reviennent à leur place et y restent une fois le travail des mécanos fait. En effet, si il manque le moindre outil dans l’armoire, cela implique que celui-ci est resté quelque part, et très probablement dans l’avion. du coup, l’Alphajet reste cloué au sol tant que l’outil n’est pas retrouvé ! Autant s’assurer que tout soit bien à sa place !
Des appareils qui ont parfois opérés à la Patrouille de France
Dans le hangar juste à côté se trouve un Alphajet de la PAF. La capitaine nous apprend plusieurs info sur les avions de notre belle Patrouille Aérienne Française. Par exemple, les gros travaux sur les avions se font à Cazaux maintenant. Ou encore, et contrairement à l’idée que nous en avions, le parc de la PAF tourne pas mal. Nombre d’Alphajet du “Côte d’Or” ont été membre de la PAF. On peut d’ailleurs s’en rendre compte avec la petite sortie d’air présente le long du fuselage et qui a encore des trace de peinture de la PAF.
Notre visite touche presque à sa fin mais c’est sans compter sur la cellule communication qui est gentiment passé nous voir pour faire connaissance, en savoir plus sur notre activité et nous donner de précieux conseils pour nous permettre d’avancer dans le bon sens et nous permettre de vous proposer toujours plus de contenu !
Le remorquage de cibles air-air
L’Alphajet peut emporter la cible aérienne TAXAN logée dans le conteneur Secapem Type 520 avant son déploiement.
La cible se compose de deux éléments principaux : le module de détection et le Tetraplan (visuel textile). Elle dispose d’un système de scoring acoustique (ASPI) et permet une restitution des résultats de tirs en temps réel sur une interface dédiée. Source.
JTAC : spécialistes de l’appui aérien (Close Air Support)
Le JTAC intervient lors du déclenchement de missions “CAS”. Il va jouer un rôle essentiel dans l’intégration de la mission d’appui aérien, en communiquant en continu avec les pilotes en vol. En outre, il assure la sécurité des troupes amies au contact. Sa formation lui permet de coordonner les troupes terrestres avec l’emploi des moyens aériens tout en prenant en compte les dommages collatéraux. Source.
Le 100 Squadron de la Royal Air Force
Le 3/8 n’est pas unique en son genre. Aux Etats-Unis, les Escadrons “Aggressors” opèrent depuis la Guerre Froide au profit de l’USAF ou de l’US Navy. Outre Manche, c’est le 100 Squadron qui assure cette fonction au sein de la Royal Air Force, avec des “Hawk” très proches des Alphajet sur le plan des caractéristiques. Les 2 escadrons mènent souvent des exercices en commun afin d’améliorer leur interopérabilité.
Archives photos de nos contributeurs : une partie de l’histoire du Côte d’Or …
Cursus d’un pilote de Chasse
- 1998 : Baccalauréat.
- 1999 : entrée EOPN (Élève Officier du Personnel Navigant).
- 2000 à 2004 : Salon de Provence avec cours de base et ATPL, puis Cognac sur Epsilon, Salon sur Tucano, Tours sur Alphajet et enfin Cazaux.
- 2004 à 2008 : Cambrai à l’Escadron de Chasse 2/12 “Picardie” sur Mirage 2000 C.
- 2008 à 2010 : Tours comme instructeur.
- 2010 à 2013 : Djibouti à l’Escadron de Chasse 3/11 Corse sur Mirage 2000-5F.
- 2013 à 2016 : Lyon (Etats-Major).
- 2016 à aujourd’hui : Cazaux au grand 3/8 !
“Julien” affiche environ 3000 heures de vol et quittera prochainement la grande famille de l’Armée de l’Air. Callsign : “Lucky”.
Remerciements
La rédaction tient à remercier tout particulièrement le Capitaine “Julien”, ainsi que l’Escadron d’Entraînement 3/8 pour leur accueil. Merci également à la cellule communication de la base de Cazaux d’être venu à notre rencontre. Nous souhaitons une bonne reconversion à “Lucky”.
Pour en savoir plus sur les métiers de l’Armée de l’Air, cliquez ici
La page Facebook de l’Escadron d’Entrainement 3/8 “Côte d’Or”, cliquez ici
Textes : Sébastien Lallemand et Philippe AMIEL. Photos : © Sébastien Lallemand
3 thoughts to “Escadron d’Entrainement 3/8 “Côte d’Or””
Saint Dizier n’a transféré ses AlphaJet qu’en Mai 2008 à Dijon.😉
Merci pour cette précision, je vais corriger. J’admets avoir eu un peu de mal à reconstituer le parcours du Côte d’Or … :-/
Suite à une question posée par un lecteur, nous confirmons l’absence de Navigateurs Officiers Système d’Arme à l’Escadron 3/8 “Côte d’Or”. En revanche, quelques NOSA sont présents à l’ETO.